Les Lumières: film documentaire
LES LUMIÈRES
Un film documentaire de Valérie Simonet (60′)
Produit par Valérie Montmartin
Une production LITTLE BIG STORY
Comment repenser les manières d’apprendre et de transmettre le savoir ?
Des enseignants de l’Université d’Aix-Marseille y ont répondu en créant de toutes pièces une licence unique en son genre : la licence Sciences et Humanités. Née d’une lutte contre la réforme de 2009 de l’enseignement supérieur, cette formation expérimentale est une utopie qui a vu le jour.
Pendant trois ans, au sortir du Bac, les étudiants vont aborder le savoir par le croisement des disciplines. Ils découvriront ainsi toutes les facettes de la couleur, par exemple, grâce au dialogue orchestré entre la chimie, la sociologie et les lettres modernes. En suivant quatre d’entre eux, de la première à la troisième année, le film décortique cette mécanique subtile qui n’est pas donnée d’emblée. Pour certains, cet exercice complexe de la pensée débouchera sur une métamorphose. En regardant à la loupe cette expérimentation, Les lumières propose une réflexion sur une possible autre voie dans l’éducation, grâce à la transdisciplinarité.
Pour entrer dans la licence Sciences et Humanités, il faut d’abord passer des entretiens. Pas tant pour être sélectionné, que pour comprendre à quel versant du savoir on s’attaque. Cette formation transdisciplinaire, unique en France, est si particulière que ses enseignants jugent nécessaire d’en expliquer le fonctionnement. En Sciences et Humanités, les disciplines ne sont plus juxtaposées comme au lycée : les frontières entre elles sont brouillées pour qu’elles viennent chacune apporter leur pierre à un savoir commun.
Joanna, 18 ans au début du film, est bien décidée à en être, malgré les grosses réserves émises par les deux professeures qui la reçoivent. Elle vient d’un milieu populaire, dans lequel on ne lit pas. Elle trouve cette formation « pluridisciplinaire » intéressante pour atteindre son objectif : devenir professeure des écoles.
Robin, futur bachelier de 18 ans, est né dans une famille d’intellectuels qui a choisi de s’établir loin du monde, à la montagne, tout en créant une ONG. Il est emblématique d’une jeunesse préoccupée par les questions climatiques et angoissée par les désordres qui en découlent. Axelle, 19 ans, vient de banlieue parisienne. C’est un feu follet qui ne sait pas canaliser son énergie. Tout l’intéresse. Elle voudrait comprendre l’univers qui l’entoure et pourquoi pas devenir astrophysicienne. Maël enfin, est le plus âgée des quatre étudiants au cœur du film. Il a 26 ans. Il a quitté l’école après le bac pour voyager : du chemin de Compostelle à l’Asie. Huit ans plus tard, il a voulu poser ses bagages pour mettre des mots et des concepts sur ce qu’il a vécu. « Apprendre à avoir une pensée complexe», est ce qui l’a attiré, dit-il, sans aucun projet professionnel à la clé. Il leur faudra trois ans pour comprendre réellement la mécanique singulière de cette formation, qui s’explique d’abord par sa genèse.
La licence Sciences et Humanités est en effet née d’une lutte. En 2009, sous Nicolas Sarkozy, les lois Pécresse dessinent une future autonomie des universités. Au cœur de la réforme : la volonté de professionnaliser les futurs étudiants, de faire de l’université « une entreprise ». Les enseignants- chercheurs sont vent debout dans toute la France et bloquent les facs pendant six mois. Le mouvement est particulièrement suivi dans l’académie d’Aix-Marseille (AMU). Pendant les manifestations et lors des AG, des universitaires rencontrent leurs pairs des autres disciplines. Pour la première fois, des physiciens parlent à des profs de lettres. Et ils ont des choses à se dire puisque souvent, sans qu’ils le sachent, ils enseignent un même sujet, chacun dans sa langue.
Gaëtan Hagel, enseignant-chercheur en physique d’AMU, lance un appel pour imaginer ensemble un idéal pour l’université. Une formation qui ressemblerait à ce qui pourrait se faire de mieux en matière d’enseignement. Ils seront une trentaine d’universitaires à le rejoindre pour mettre sur pied cette licence novatrice, trois ans durant.
En 2012, la première promotion est accueillie à l’Université d’Aix-Marseille, dans une formation inédite qui pousse la transdisciplinarité jusqu’à proposer des cours à trois voix aux élèves. Le cours sur la couleur est en l’espèce très parlant. Dans la salle, une sociologue, une chimiste et une professeure de lettres modernes vont se passer la parole pour parler du bleu, chacune de son point de vue. Le cours se prolonge en salle de travaux pratiques, sur la paillasse, puisque les élèves vont devoir eux-même fabriquer une couleur.
En Sciences et Humanités, le savoir n’est pas qu’un discours, il se double aussi de la pratique des disciplines. Un étudiant qui voudrait se spécialiser en chimie, pour la suite de son parcours, pourrait le faire. Il en va aussi d’une mise en mouvement et d’une considération du corps des élèves dans les enseignements, un des principes qui sous-tend la formation. Pour les quatre étudiants, le bilan des trois années prend des formes diverses, selon leur personnalité. Robin n’a jamais résolu ses problèmes existentiels et a vécu cette traversée des disciplines en miroir avec son propre errement. Il veut retourner à la terre.
Axelle s’est ancrée. Elle semble avoir trouvé sa voie, entre psychologie et neurosciences, pour devenir peut-être neuropsychologue. Maël, le plus âgé des quatre, s’est posé au long du film en observateur passionné du travail de remise en question de l’Education proposé par la Licence. Il a décidé à son tour d’être un maillon de cette chaîne de transmission, à l’école primaire.
Mais c’est chez Joanna que la métamorphose est la plus spectaculaire. Elle parle d’un déclic. Elle est devenue une grande lectrice et poursuit son rêve d’être professeure des écoles. Elle est bien décidée à adapter la transdisciplinarité, avec laquelle elle jongle désormais, aux enseignements des plus jeunes. Des graines semées qui viendront peut-être réformer l’Education de l’intérieur.
CONTACTS
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